« La culture actuelle du sujet n’est pas séparable, sur le plan social et collectif, de l’exigence démocratique. Elles se rejoignent et s’appellent l’une l’autre. »
André FOSSION, Dieu toujours recommencé, p. 29.
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GRILLE DE LECTURE
La culture démocratique de la société contemporaine célèbre la primauté de la personne humaine dans son individualité profonde. La valorisation contemporaine du sujet lui ouvre un espace de liberté, d’invention et de création qui est inséparable de la prise en compte des appartenances collectives, des mémoires et des traditions particulières. Le sujet a néanmoins la possibilité de les filtrer, de les passer au crible de la critique, de les réassumer non point comme un héritage tout fait, mais bien plutôt comme une ressource qu’il s’approprie de manière libre et inventive pour son épanouissement personnel. Cette culture du sujet est tributaire de la conception démocratique de l’homme et de la société. L’ethos démocratique veut permettre au sujet de ne point subir sa vie, mais au contraire, de gagner de la liberté face à ce qui apparaît comme emprise des déterminismes sociaux et institutionnels. Même sur le plan collectif, la défense démocratique des libertés individuelles est résolument au service d’une vie sociale harmonieuse. La culture actuelle du sujet intègre les exigences d’appartenance sociale.
L’espace démocratique dans lequel le sujet se meut lui demande d’allier liberté, mémoire et raison : liberté d’advenir à sa singularité propre, de réaliser l’appropriation des traces mémorielles de sa culture, de ses traditions, liberté d’assumer des appartenances socio-culturelles particulières, et enfin, capacité de rendre raison de ses choix. L’exigence démocratique, eu égard aux aspirations du monde contemporain, s’adresse aussi bien aux sujets individuels que collectifs. Chacun doit trouver son compte en permettant à l’autre d’exister pleinement. C’est pourquoi Alain Touraine affirmait que « l’objectif principal de la démocratie doit être de permettre aux individus, aux groupes et aux collectivités de devenir des sujets libres, des producteurs de leur histoire, capables d’unir dans l’action l’universalisme de la raison et la particularité d’une identité personnelle et collective » (Qu’est-ce que la démocratie, p. 24.) Ce faisant, l’exigence démocratique libère aussi bien les sujets que les groupes des différentes formes institutionnelles de sujétion (lourde bureaucratie, logique économique oppressante, logique dominatrice des systèmes…) Elle veut leur permettre d’être véritablement des acteurs, non de simples figurants, sur la scène de l’histoire commune. En définitive, l’appartenance collective et communautaire ne ruine pas les chances d’épanouissement personnel que la démocratie offre au sujet moderne.
Emmanuel AVONYO, op
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