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Le temps entre ombres et lumières

L’Atelier des concepts, Par Emmanuel AVONYO, op

Semaine du 19 octobre 2009

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Les plus grands questionnements sur l’objet de notre enquête peuvent se formuler en ces termes : qu’est-ce que le temps ? Quel est son rapport à l’homme et à l’histoire ? Est-on capable de l’expliquer facilement et brièvement ? Peut-on le concevoir, même en pensée, assez nettement pour exprimer par des mots l’idée qu’on s’en fait ? Existe-t-il une conception unifiée du temps ? Le temps est-il éternel ? De l’antiquité grecque à la modernité en passant par le Moyen Age, la question du temps n’a fait que diviser les esprits compétents. La difficulté à enserrer ce concept réside dans son caractère paradoxal, voire mystérique.

Néanmoins les philosophes n’ont jamais cessé d’y réfléchir vu qu’il est un trait fondamental du comportement psychologique et physique de l’homme. L’atelier des concepts nous propose d’explorer en plusieurs étapes les grands moments de l’histoire de ce concept. Ce qui va suivre n’est pas le travail d’un expert mais une modeste contribution à la relecture de l’histoire de la philosophie à travers l’un de ses matériaux conceptuels les plus usités. En tant que tel, et dans un souci didactique, notre réflexion est délibérément tributaire de la pensée des philosophes qui se sont déjà appesantis sur le concept du temps. Au-delà de la fidélité à l’histoire, l’originalité de cette entreprise, s’il en est une, serait de proposer une lecture post-moderne et critique du problème de la temporalité, problème constitutif selon nous de toute interrogation philosophique sur l’existence humaine. Vos critiques aideront à l’améliorer.

Le temps, un concept paradoxal

Avant de relire l’histoire de la philosophie en compagnie de nos illustres prédécesseurs, il convient de nous laisser interroger par la particulatité de ce concept. De la même manière que tout coule, tout passe en son contraire sous le soleil héraclitéen, le temps à l’époque contemporaine est constamment en fuite. L’on ne prétend saisir le temps que lorsqu’il s’est déjà évadé ne laissant sous notre contrôle que sa trace. Que le poète demande au temps de suspendre son vol, cela ne peut pas persuader le philosophe. L’on ne peut parler de suspension du temps sans un ante et un post-temps. L’ante-temps n’est pas moins temporel que le post-temps. Toute suspension n’est possible que dans le temps. En fait, le temps ne saurait suspendre son vol, ne serait-ce que pour un certain temps, sans ruiner définitivement l’être, car l’être du temps est essentiel à l’existence humaine, et tout ici bas porte le sceau du temps comme l’indice de l’être au monde et de la finitude.

Le temps coule sans cesse. Le propre du temps est d’être fugace tout en suggérant des traces d’éternité (Jean Granier, Art et Vérité). La fugacité est la vérité du temps. Tout coule, le temps aussi, tout peut s’arrêter, mais le temps poursuivra inexorablement sa course pour faire être dans le temps, pour donner sens à la temporalité et à l’être. Ce temps qui fuit est le même qui dure. Le temps passe et demeure. Le temps, en portant dans son concept l’« ambivalence de l’être parménidien » et l’« évanescence de l’être heideggérien », est une constante interpellation pour le philosophe. Qu’est-ce alors que le temps pour qu’il ne se donne que de façon éphémère et ne dure qu’à la condition de fuir ? La question peut être encore posée autrement : peut-on dire du temps qu’il passe pendant qu’il demeure ? Le temps est-il à venir alors même qu’il est toujours déjà-là ? Ces questions effleurées sous une certaine forme dans l’introduction rebondissent avec d’autant plus d’acuité que le temps se présente à nous comme un concept pour le moins paradoxal.

Mais les réponses à ces interrogations envahissantes sont si peu satisfaisantes que toute connaissance du temps paraît ressortir du provisoire et de l’incertain. Provisoire car notre expérience du temps est limitée, incertain parce que nul ne juge du temps qu’englouti dans le temps. D’où le paradoxe de la notion du temps. Elle est une évidence et un mystère. Le mystère du temps participe du mystère de l’être. Les nombreuses réponses que l’histoire de la philosophie donne à ressasser n’épuisent guère l’évident mystère de la notion du temps. D’Aristote à Hegel en passant par Kant, de Platon à Augustin et à Heidegger, chacun expérimente le temps mais personne ne parvient à l’incruster dans une définition. Saint Augustin a fait cette expérience paradoxale lorsqu’il affirmait ne plus savoir définir le temps lorsqu’on le lui demandait (Les Confessions, Garnier-Flammarion, Paris, 1964, p. 264.)

Le vocabulaire philosophique conçoit néanmoins le temps comme une période qui va d’un événement antérieur à un événement postérieur, le changement continuel par lequel l’avenir devient le présent, et le présent devient le passé, une sorte de trame mobile entraînant les événements sous le regard d’un observateur du présent vers l’oubli. Le temps n’est donc pas une horloge, comme dirait Henri Bergson. L’horloge n’est pas un morceau de temps, mais de l’espace. Le temps est une catégorie de l’esprit et non du physique. C’est peut-être ce pourquoi Spinoza définissait le temps comme la comparaison de la durée des choses qui ont un mouvement invariable et déterminé. Si la durée est réelle, le temps n’est que notre façon de mesurer la durée. De manière générale, pour cette mesure, le temps implique la succession du passé, du présent et de l’avenir. Nous verrons avec Aristote et surtout avec saint Augustin que seul l’instant présent est, le passé n’est plus et le futur n’est pas encore. Pour Kant, le temps est l’intuition de notre sens interne et la condition de possibilité de toute l’expérience humaine. A travers l’inscription du Dasein dans le temps, nous apparaît clairement la fragilité de l’homme  et de toute la réalité physique qui n’existent que dans le temps.

Cher lecteur, lorsqu’on se met à scruter chacun des différents modes d’approche du temps, l’on remarque aisément qu’aucun temps présent, passé, à venir n’échappe à l’anéantissement, le temps s’évapore inlassablement au point que la question peut se poser de savoir si le temps existe réellement. Le temps s’abolit continuellement « si bien que ce qui nous autorise à affirmer que le temps est, c’est qu’il tend à n’être plus. » (Saint Augustin, Les Confessions, Garnier-Flammarion, Paris, 1964, p. 264). Le paradoxe  du temps réside selon nous dans le fait qu’il n’y ait le passé qu’à la condition de son irréalité, et qu’on ne puisse entrevoir la réalité du futur que dans sa virtualité, sa possibilité, son imaginabilité. Si tout ne peut être pensé qu’à partir d’un présent instable ou éternel, le présent lui-même est convoqué à l’oubli et l’on n’en parle que quand il relève d’un simple souvenir. Le paradoxe du temps est aussi celui de l’attente angoissée de l’avenir et de la mémoire indigestible du passé.

Mais le caractère mystérique du temps fait qu’il passe mais n’est pas passé, il vient mais n’est pas à venir. Tout passe et tout arrive au présent, sinon plus jamais. Ce paradoxal et mystérique du temps s’observe une fois de plus dans une sorte de collusion entre le temps et l’éternité. Si seul le présent est, vivre toujours au présent, c’est vivre un présent éternel. Ce présent éternel est l’éternité. Il est quasiment inconcevable pour l’esprit que l’avenir et le passé ne puissent exister qu’au présent, et que l’on ne soit déjà pas dans un présent éternel. Le présent change mais il ne  commence ni ne cesse. Pour le stoïcisme comme pour le spinosisme, l’existence qui n’est qu’au présent est une continuation ininterrompue du présent. L’aporie du présent qui n’est pas éternité révulse l’esprit dont l’essence est éternelle. « Carpe diem, carpe aeternitatem (cueille le jour, cueille l’éternité) ». Le présent est le moment kaïrétique de l’action, le moment véritatif du temps. Une philosophie du présent éternel, d’une existence qui n’est qu’au présent a des chances d’être rejetée par l’espérance judéo-chrétienne. Qu’importe! Aristote lui n’en connaît aucune lueur. Le réalisme aristotélicien ne s’accommodant guère du mystère, soutient que seul l’instant présent, seule l’unité temporelle existe comme la mesure ce qui est mû.

Le temps du monde chez Aristote

Cette dissertation sur le temps aristotélicien prend appui sur les textes choisis de la Physique (IV, trad. Maurice Dayan, PUF, 1966). Chez Aristote, l’étude du temps commence à partir des difficultés liées à son existence et à sa nature. Dans les chapitres X à XIV du Livre IV de la Physique, Aristote s’atèle à définir le temps dans son rapport au mouvement, à l’instant et à l’âme.  Aristote tente de tourner le dos à la tradition cosmologique selon laquelle le temps domine le l’homme, l’âme et le monde. Pendant que Platon définit le temps comme le mouvement de tout, Aristote affirme que le temps, en tant que détermination du mouvement, mesure toutes les choses physiques mues. Le temps n’est pas mouvement de tout mais la mesure de tout mouvement. Il est le nombre du mouvement.

La cosmologie du mouvement

Pour une meilleure intelligence du concept du temps, il nous faut nous situer d’abord par rapport à la physique aristotélicienne du mouvement. Aristote distingue plusieurs mouvements dont les plus importants sont : d’une part, le mouvement circulaire. Il est un mouvement parfait, immuable et éternel, il appartient aux sphères astrales ;  d’autre part, le mouvement radial non immuable du monde sub-lunaire. Et la conception aristotélicienne du temps est dite cosmologique parce qu’elle repose sur le mouvement circulaire régulier. C’est en quelque sorte le mouvement du ciel, le mouvement divin, car le monde supra-lunaire est le premier mû par le Premier Moteur immobile. Le mouvement translatif simple vers le haut est à l’origine de l’idée d’un temps circulaire chez Aristote.  Ce fait annonce déjà la priorité du mouvement sur le temps. Le temps n’est pas le mouvement. Mais on ne peut guère penser le temps physiquement en dehors du mouvement et du changement.

Temps et mouvement

En effet, le temps est le même partout, en toute chose, alors que le mouvement suppose un sujet mobile pour être, un sujet dans lequel il existerait. C’est la perception du changement (mouvement) qui donne la perception de l’écoulement (le temps). Le mouvement est chaque fois dans la chose changeante (mue), alors que le temps est partout et en tous également. Le changement peut être lent ou rapide, mais le temps ne peut comporter la vitesse, la vitesse étant elle-même facteur du temps. Ainsi, l’absence de perception du changement ne nie pas l’existence du temps mais c’est cette perception de la génération  (naissance, émergence), de la corruption (destruction, changement négatif) et de l’accroissement qui permet de saisir l’écoulement du temps.

Le temps n’est pas le mouvement, disions-nous, mais il « est quelque chose du mouvement », une détermination et une disposition du mouvement (Physique, IV, 11, 2, 9 à 10). Aristote proclame ainsi la priorité du mouvement sur le temps. Le temps est nombre du mouvement ; non d’un mouvement quelconque mais de tout mouvement. Le temps ne peut être saisi que dans son rapport aux réalités physiques en tant qu’elles sont mues. Il est la succession de ce qui est mû. En fait, c’est dans le temps que se produisent la génération, la corruption, l’altération et la translation (déplacement, transfert, sorte de mouvement). Ainsi dans la mesure où il y a mouvement, il y a nombre de chacun de ces mouvements. Le temps reste identique à lui-même quels que soient les mouvements. C’est l’unité de l’espèce qui fait l’unité du temps, car que l’on prenne sept chiens et sept chevaux, leur nombre étant le même, le nombre de leurs mouvements simultanés, c’est-à-dire le temps, sera le même. Les mouvements ont beau être différents, le temps est le même pour les mouvements simultanés et égaux, il est le même pour le même genre de mouvements. Une nouvelle question surgit ici.

Temps, mouvement et âme

Quelle est la place de l’âme dans cette relation ? La question qui se pose à Aristote est précisément de savoir si en l’absence de l’âme, le temps pourrait être. C’est l’âme qui nombre le temps, dit Aristote. Or la subjectivité temporelle aristotélicienne traitant du rapport entre l’âme et le temps, interdit que l’âme soit le temps, que le nombrant soit le nombre. Aristote résout le problème en avançant que sans l’âme, le temps est. L’âme n’engendre pas le temps. Si tant est que l’âme est le nombrant du temps, nous inférons logiquement que sans l’âme, il n’y pas de nombrement, de mesure du temps. Le temps existe donc sans l’âme, le mouvement aussi existe sans l’âme.  L’âme n’intervient que pour nombrer le temps.  C’est l’unicité du temps et son universalité qui le rendent dépendant de l’âme, à cause de l’importance de l’intellect dans la détermination (nombrement) du temps. Dans l’âme, c’est l’intellect qui nombre. Cette relation entre l’âme et le temps ne semble pas assez élucidée aux yeux de saint Augustin. Peut-être réussira-t-il à affranchir la conception psychologique du temps de la conception cosmologique.

Un point nous paraît important à souligner en vue de nos développements futurs sur la temporalité : c’est le rôle de l’intellect dans le nombrement du temps par l’âme. L’on comprend pourquoi l’idéalisme philosophique dira que c’est l’intelligence qui ordonne la succession de ce qui est mû et lui donne son unité. L’intelligence mesure le monde physique et tout l’être. Chez Kant, l’intelligence préforme notre connaissance de l’être mais le temps est une condition préalable à cette connaissance. Dans son rapport à l’intelligence, le temps se positionne comme ce qui « rassemble », ce qui donne forme à la succession du mouvement et lui confère une certaine unité. Le temps formalise le conditionnement de ce tout ce qui est.

Temps, mouvement et instant

L’étude du temps rapporté au mouvement ne doit pas occulter le temps dans ses déterminations propres. Que dit Aristote du statut de l’instant par rapport au temps ? Le temps n’est pas l’instant, enseigne le précepteur d’Alexandre le Grand. L’instant n’est pas non plus une partie du temps mais il est la condition du temps. Dans notre langage moderne,  nous dirons que l’altérité de l’instant est la condition du temps. Analogiquement au mouvement, le « maintenant » est la condition de la succession, de la perception de la durée. Le temps est le nombre du mouvement, et l’instant l’unité de mesure du temps. L’instant n’est donc pas une partie du temps mais une limite de celle-ci. Sans mouvement, le temps serait, mais demeurerait inperceptible. Mais sans instant, il n’y aura pas de temps aristotélicien,  et vis versa. En fait, la centralité du temps est indéniable de la cosmologie d’Aristote.

Temps, mouvement et être

En ce qui concerne le rapport du temps à l’être, la priorité future de Heidegger, Aristote semble suivre Parménide. Dire le temps, c’est faire signe vers l’être. Le temps aristotélicien semble participer de l’être et du non-être, le temps a été et n’est plus, il est sur le point d’être et de n’être pas encore. Cette ambivalence préfigure la subdivision du temps chez Augustin. C’est peut-être la preuve que le passé, le présent et l’avenir ne sont pas étrangers au vocabulaire d’Aristote. Même s’il ne les emploie pas clairement, ces idées sont sous-jacentes à la cosmologie du temps. « Si l’antériorité et la postérité se trouvent dans le mouvement », dit Aristote, « elles constituent pour la même raison le temps  » dans la mesure où elles sont nombrables.

Notons encore qu’en dépit du fait que le temps soit évanescent et divisible en parties, tout mouvement et tout changement sont dans le temps. L’être est donc dans le temps. Le temps n’est pas dans le temps, de même l’être intemporel n’est pas dans le temps. L’être intemporel comme le temps ne sont pas susceptibles de corruption et ni de génération. Seuls les étants temporels sont mesurés par le temps. Que le temps mesure le mouvement, cela justifie le fait que le temps soit nombre. Une nouvelle question point. Le temps peut être long ou court, être le même partout et simultanément. Il y a toujours au moins un temps mais qui n’est pas une grandeur minimale.

Cher ami du concept, cette discussion avec Aristote a été plus longue que nous ne l’avons espéré. Nous avons tenu à parcourir le temps dans sa relation au mouvement, à l’âme, à l’instant, puis à l’être. C’est cela qui nous fonde à penser que la cosmologie du temps est pour ainsi dire indissociable d’une ontologie du temps.  Pensionnaires de L’academos, Aristote est notre grand-père dans la pensée. Pour le reste de notre parcours dissertatif sur le temps, notons qu’après une phase d’exposés explicatifs du concept du temps, la suite de notre démarche sera historico-critique. A la suite de cet examen du temps cosmologique chez Aristote, l’atelier des concepts nous proposera une lecture complémentaire du temps, celle du temps psychologique chez saint Augustin. Une étude succincte de la phénoménologie du temps chez Kant, Hegel, Husserl et Heidegger nous permettra de mieux comprendre le destin philosophique de  la cosmologie et  la psychologie du temps. Ce méditatif sur le temps se prolongera par la critique que fait Paul Ricoeur de ces différents concepts du temps dans son livre majeur Temps et Récit.

A suivre >>> Le temps de l’âme chez saint Augustin

>>> Ontologie et phénoménologie >>>

Peut-on réinventer le développement ?

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Le billet de Mejnour 33

Mejnour ben Hur, mejnourbh@gmail.com

Dixième travail d’Hercule

12, il n’y en a que douze, ces travaux. Ils nous servent à présenter quelques réflexions sur des valeurs humaines, sur de judicieuses manières d’accomplir ce qu’Aristote appellerait notre « métier d’hommes ». Hercule nous servira donc de prétexte pendant quelques jours encore. Puis nous passerons à d’autres sujets, peut-être plus « incarnés » dans le philosopher de l’Academos. Mais notre goût d’une certaine simplicité nous interdira, eu égard à la vocation de ce billet, d’aller en profondeur. Nous nous contentons de jeter un mot ou un autre, le compagnonnage voulant qu’en chacun les mots poursuivent leur route et aboutissent à cette conclusion fameuse du philosophe : « ici aussi les dieux sont présents ». Dans l’attente de ces jours glorieux, lisons le dixième travail d’Hercule :

10° Capture des boeufs de Géryon : ce géant demeurait dans un pays de l’Ouest, au-delà des limites connues de la Terre. Héraclès partit en expédition, franchit le détroit de Gibraltar, y élevant deux colonnes pour laisser des traces de son passage. Mais, accablé par la chaleur, le héros menaça Hélios de ses flèches. Pour l’apaiser, le soleil lui prêta un bateau d’or qui lui permit de franchir l’Océan. Héraclès tua alors Géryon, les gardiens du troupeau et s’empara du bétail. Il revint ensuite par la Gaule, l’Italie et la Thrace dans les territoires d’Eurysthée, qui sacrifia tous les animaux à Héra. »

Bonne lecture, fructueuse méditation. A demain. Mejnour te salue!

>>>VOIR LE BILLET DE MEJNOUR 32

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